30. Don Quichotte et bénévolat chez les sans-logis


Mon bel hidalgo. Voilà l’inscription que ma blonde avait apposée sur l’enveloppe de ma carte d’anniversaire. J’ai d’abord été charmé par la consonance du mot hidalgo et son arrimage avec le bel adjectif. La lecture des mots d’amour de ma blonde a achevé de me faire fondre et c’est dans cet état de grâce privilégié que j’ai déballé son cadeau. Il s’agit d’un magnifique livre « relié en pleine peau (en cuir) dorée à l’or fin 23 carats ». Je sais, ce n’est que l’enrobage mais, croyez-moi, tout le livre est exceptionnellement conçu et agréable à manipuler autant qu’à lire !… Le livre est intitulé Don Quichotte de la Manche. Ce roman a été écrit par Miguel de Cervantes et fut publié à Madrid en deux parties, en 1605 et 1615. Son titre original était L’ingénieux Hidalgo (gentilhomme) Don Quichotte de la Manche.

Don Quichotte dans sa bibliothèque. Gustave Doré, 1863.

Le livre est enchâssé dans un joli boitier cartonné à l’effigie du célèbre dessin de Picasso (malheureusement non libre de droits de diffusion sans autorisation). Il n’en fallait pas plus pour que je me retrouve, à mon tour, tout comme Alice, dans un pays des merveilles : sur les terres de ce personnage mythique de Don Quichotte auquel je m’identifie aisément. Je ne connais pas son histoire de fond en comble et j’entends bien l’explorer à travers les 1200 pages du petit livre que je viens de recevoir en présent d’anniversaire… Toutefois, une petite recherche Internet me précise qu’Alonso Quichano, cet hidalgo de la Manche, est épris de chevalerie et qu’il lit beaucoup à ce propos. Un beau jour, il commence à se prendre pour le chevalier errant Don Quichotte qui parcourt le pays pour combattre le mal et aider les opprimés… C’est bien là le Don Quichotte qui m’interpelle, celui qui se dresse contre vents et marées, pour aider le monde, même lorsque nombreux sont ceux qui considèrent qu’il se bat follement contre des moulins à vent ! Avec tous les films de superhéros qui se succèdent sans cesse, je crois bien ne pas être le seul à être attiré par ces grandes épopées fantastiques aux limites du possible, ou de l’impossible, bien sûr…

La traversée du miroir. Illustration John Tenniel.

Ce ne sont pas les superpouvoirs qui m’attirent dans les grandes fables de héros, mais plutôt leur façon de vivre à la hauteur de leurs convictions, coûte que coûte. Cette façon chevaleresque de se lancer au secours des opprimés, sans trop se soucier des difficultés. Lorsque Don Quichotte vole au secours de la veuve et de l’orphelin, sans superpouvoirs, et même assez décalé de la réalité, cela me parle beaucoup… Lorsque je monte aux barricades pour me porter à la défense de l’environnement, des animaux d’élevage ou des humains défavorisés, je peux aisément être ignoré, rabroué ou même parfois ridiculisé. De plus, en empruntant ces avenues non balisées, on peut facilement dépasser nos limites, perdre pied et s’égarer, momentanément, dans une fantaisie pathétique comme celle de Don Quichotte, où l’on ne rejoint plus grand monde. J’ai aussi connu de tels détours… Il faut croire que l’on porte rarement l’armure sans connaitre de bavures… Mais lorsqu’on a goûté au soleil radieux du champ de bataille, pas question de retourner survivre à temps plein dans la froidure sombre et humide de la forêt désenchantée. 😊

Bénévolat chez les sans-logis

Les réminiscences chevaleresques se sont dissipées au fil des nombreuses activités qui ont suivi mon anniversaire : examens médicaux, entraide, théâtre, réunion de famille et… rendez-vous pour un nouveau bénévolat. J’ai rencontré un responsable des bénévoles dans un organise travaillant principalement à accueillir, soutenir et encourager les personnes sans domicile fixe ou vivant d’autres situations de grande précarité. L’entrevue et le petit tour de l’endroit ont été très agréables et je commence dès demain !

Diogène de Sinope. Jean-Léon Gérôme, 1860.

Le centre est un lieu de rencontres et d’activités ouvert aux 55 ans et plus. Les gens peuvent y prendre un breuvage et une soupe, utiliser un ordinateur ou un téléphone, regarder la télé ou lire, rencontrer des gens et participer à de multiples activités : assistance informatique, sorties diverses, visionnement de films, célébration d’anniversaire, jeux de société, etc. Comme bénévole, je serai appelé à me rendre utile dans ce contexte, selon les situations qui se présentent : remplacer à l’accueil, assister les organisateurs lors des activités, nettoyer ou ranger la vaisselle et… principalement, entrer en contact avec les personnes accompagnées pour les écouter, échanger avec eux et les aider au besoin.

J’ai vraiment aimé l’ambiance générale qui émanait du lieu et des gens… un heureux mélange de quiétude et d’inquiétude ou… de sollicitude et de solitudes… C’est un beau début d’histoire, à tout le moins. Et pour le reste, on verra bien…

Nouveau travail (bénévole) et fébrilité

Lundi matin. La fin de ma nuit a été un peu plus fébrile qu’à l’habitude. Ma nouvelle activité de bénévolat qui aura lieu aujourd’hui suscite une légère anxiété. Est-ce que la greffe prendra ? Lentement ou graduellement ? Avec ou sans complications ?…

Je prends mon vélo au petit matin de cette belle journée ensoleillée et fraiche d’automne pour me rendre au café. J’y ai fait un peu de lecture inspirante…

Sur ma route de vélo. Photo : Benoît Guérin, 2017.

Ni trop d’espoir, ni trop de craintes !… Je reprends mon vélo et me dirige vers cette nouvelle expérience…

Le retour du chevalier  

Je rentre tout juste de cette première journée de bénévolat. Je suis épuisé. Beaucoup de nouveautés dans une même journée ! Nouveaux visages et nouveaux noms, plusieurs informations concernant les façons de faire de l’endroit et les emplacements à retenir. Globalement, c’est très positif. La chaleur humaine détectée lors de mon premier passage s’est confirmée, mais elle est un peu moins généralisée qu’il m’avait semblé… J’ai déjà tissé des liens plus significatifs avec quelques travailleurs de l’organisme et certaines personnes accompagnées. La journée s’est composée de dizaines de situations différentes dont la plupart étaient intéressantes, voire même agréables. Bref, j’entends bien y retourner lundi prochain. Ce soir, c’est le repos du guerrier ! 😊

Le repos du guerrier. Photo : Benoît Guérin, 2017.

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4 commentaires à propos de “30. Don Quichotte et bénévolat chez les sans-logis”

  1. Bonjour Benoit, je te félicite pour ton implication dans ton nouveau bénévolat auprès des personnes itinérantes. Je te souhaite d’y vivre des moments de bonheur et de gratitude semblables à ceux que je vis quand je fais des visites d’amitié à des hommes esseulés de la résidence Le voilier à Saint-Jérôme. Tu te reconnais parfois dans Don Quichotte qui est ignoré, rabroué et même parfois ridiculisé. C’est un peu la même réalité pour moi qui m’identifie à mon ami Jésus de Nazareth qui a lui aussi connu une réalité similaire. C’est une façon de vivre à la hauteur des convictions qui m’habitent. Au plaisir !

    • L’aide directe auprès des personnes qui en ont besoin a toujours été une source de satisfaction pour moi (comme pour toi d’ailleurs).
      Là où cela devient souvent un plus grand défi, c’est lorsqu’on ose vivre à la hauteur de nos convictions, je suis bien d’accord avec toi, mon ami. En particulier, lorsque nos convictions dépassent le jupon des perspectives dominantes de notre époque, je dirais. Mais bon, c’est aussi à ce propos qu’émergent les sentiments d’accomplissement les plus satisfaisants et… je ne m’en priverais à aucun prix ! 🙂
      Au plaisir!

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