Triste-heureux [2] *
Le Vaisseau aux flancs diaphanes
Ce peut-être aussi le mien ou le vôtre ;
En fait, il pourrait s’agir de vous ou de moi.
Bien sûr, nous ne sombrons pas dans l’abîme, pour le moment,
Mais dans le rêve probablement que nous sommes,
Pour le meilleur et pour le pire, assez continuellement.
Les fruits de nos rêvasseries sont bien là, amers,
Dans le smog des villes ou dans le lit des rivières alanguies,
Mais aussi dans nos jours de labeurs souvent trop longs ;
Dans nos relations qui traînent en longueur
Ou qui se font attendre pendant de trop longues heures.
Heureusement, au fil des jours, il y a le rire d’un enfant
Et le vent doux du printemps, heureusement ;
Il y a aussi la pluie qui rafraîchit les jours trop chauds,
Et fait ressortir les odeurs de la nature en un bouquet plantureux
Comme en automne lors du spectacle, merveilleux, des couleurs dans les arbres.
Mais quand la vieillesse, la maladie ou la mort
Pointent leur nez autour de nous ou dans notre cour étonnée,
Notre rêve prend des allures de cauchemar
Et on se réfugie à la télé, sans être soulagé – vraiment,
Et on continue d’avancer, un peu plus nerveusement, toutefois.
Heureusement, il y a aussi cette chanson
Qui réchauffe mon cœur de ses mots qui me parlent,
Il me semble, et de sa musique qui me berce et m’enchante ;
Un cadeau d’auteur compositeur qui ravive mes ardeurs.
Et ces peintures et ces dessins, et ces toiles aussi
Autant d’offrandes, comme des cadeaux
Qui m’enveloppent et me ramènent à la Terre ;
Oh ! grandes lumières !
Je rentre à la maison
Et mon cœur bat la chamade… Triste-heureux.
* Le poème réfère parfois au Vaisseau d’Or de Nelligan présentée dans la deuxième partie et accessible ici.
Le monde comme vous et moi
Dans la métaphore de notre Vaisseau dort, c’est évidemment des êtres humains comme vous et moi qu’il s’agit. Ce sont les terriens qui dorment et non la Terre ; et nous ne dormons pas toujours, heureusement.
Écologiquement et d’un point de vue social planétaire, les effets actuels sont tellement importants qu’on aurait l’impression que tout l’équipage dort, continuellement et depuis très longtemps. En y regardant de plus près cependant, nous observons certains êtres humains qui semblent extrêmement réveillés aux réalités du monde. Plusieurs autres humains semblent aussi se réveiller de plus en plus souvent et de plus en plus intensément… ça bouge, quand même, c’est vivant !
Moi le premier et peut-être vous aussi, je dormais tellement continuellement, il n’y a pas si longtemps. Je me réveille maintenant de temps en temps et ce n’est pas rien ! Je rêvais ma vie comme une téléréalité qui n’en finit plus de tourner en rond dans ses intrigues. Mes emplois, mes relations, mes loisirs, toujours en quête de quelque chose pour « mon monde », entre les rares moments de répit ; je tournoyais, comme les feuilles en automne et comme les rêves qui épuisent. Pour sortir de ce cercle vicieux, j’ai dû souvent aller chercher de l’aide : thérapies, entraide, méditation, etc. ; et je dois maintenir une bonne hygiène de vie (méditation, entraide, entraînement physique, etc.), car rien n’est jamais complètement acquis, semble-t-il…
Aujourd’hui, je trouve un peu de temps pour les autres, en dehors de mes priorités à moi. Je laisse aussi une partie de mon argent servir à aider ceux qui souffrent plus. J’arrive même, grâce à des économies, à me libérer parfois de mes obligations quotidiennes de travail, afin de tendre des ponts entre mes espoirs les plus grands et la réalité : cocréation d’un organisme de gouvernance de l’humanité, rédaction d’un manifeste poétique, etc.
Pour arriver à s’ouvrir au monde, vous et moi, avons donc souvent besoin de rencontrer nos démons et de les apprivoiser. Nous avons aussi parfois besoin d’aide. Tout ce cheminement est souvent long et ardu, et plusieurs n’ont même pas la chance de l’entamer. Il ne faut pas se le cacher, cela prend un minimum de bonne fortune pour pouvoir accéder aux considérations d’amour des autres ou de compassion. Il faut pouvoir manger, boire et être en santé, se reposer, s’éduquer et… avoir un minimum de confiance en soi et en la vie ; avoir de l’amour et pas trop de problématiques autour : alcoolisme, violence, instabilité excessive, etc. Voilà tout un contrat et il semble bien que nous ne soyons pas si nombreux à y avoir accès.
Au début de ce manifeste, je mentionnais que nous sommes à peu près 500 millions (sur une population totale d’autour de 6 milliards 500 millions) à constituer les gens les plus riches de la planète. Mais combien parmi nous ont bénéficié des conditions nécessaires à se hisser la tête au-delà de notre petit monde pour voir un peu ce qui se passe dans « le monde », combien ? Quelques milliers ou quelques centaines de milliers ? Voilà toute une responsabilité, je crois, car ce ne sont sûrement pas les 6 milliards d’humains dépourvus du minimum qui peuvent travailler, pour le moment, à établir la gouvernance unifiée de notre humanité !
Au moins, pour les quelques centaines de millions d’humains suffisamment riches (amour, argent, etc.) pour combler leurs besoins vitaux, il y a toujours une possibilité d’aller chercher de l’aide, afin de pouvoir, éventuellement, sortir un peu la tête en dehors du cocon protecteur que nous croyons que constitue notre petit monde. Aller chercher de l’aide est tout de même un pas souvent extrêmement difficile à franchir, et il ne faut pas le sous-estimer…
Avant d’aller plus loin, rappelons-nous que « notre monde » est un peu comme un rêve dont il faut bien se réveiller un jour, si on veut pouvoir mener notre vie sans trop d’embûches et avec le plus de satisfaction possible. Lorsqu’on ne vit que dans notre petit monde, cela nous isole du monde en général. Il ne faut pas s’étonner de manquer d’air dans ce contexte et même, de vivre un réchauffement climatique inquiétant à l’échelle planétaire.
Notre vie est reliée à tout ce qui nous entoure et l’immensité du panorama ainsi révélé est bien réelle. Le monde perçu de cette façon peut donner le vertige, mais il donne aussi accès à des paysages fabuleux. S’ouvrir au monde, au-delà des frontières de notre monde, c’est un peu comme faire partie du grand mouvement de la vie ; la vie qui nous entoure, mais surtout, la vie dont nous faisons partie, la vie – que nous sommes – en quelque sorte. C’est un peu comme si « le monde comme vous et moi » devenait « le monde en général ». Qu’en pensez-vous ?…
La vie sur Terre est assez courte et il fait bon, somme toute, ouvrir les yeux pour la regarder un peu. Elle se présente avec ses changements constants qui sont souvent déroutants, mais qui sont souvent aussi, très exaltants et très touchants. Écologiquement, c’est d’ailleurs ainsi que l’on existe : en étroite relation avec – tout – le reste du monde. En physique quantique, dans le monde subatomique dont nous sommes composés, nous remarquons aussi l’union fondamentale de tout ce qui existe, comme si tout était relié – réellement –. Le monde est bel et bien aussi incroyable que cela, et ce serait à chacun de nous de le réaliser concrètement dans sa vie, afin de vivre à la hauteur de la réalité. Je pense qu’en chaque être humain se trouve un désir très naturel de faire – entièrement – partie du monde, où que l’on soit et avec qui que ce soit, comme notre nature fondamentale le laisse présager.
On « s’offre » le rêve en anesthésiant nos esprits et nos corps par l’alcool, la drogue, la télé, la bouffe ou d’autres stratégies semblables. Rien de cela ne constitue une fuite en soi, mais c’est souvent ainsi qu’on le vit ; c’est à chacun de voir… Il en va pareillement des longues heures de potinage ou de calomnies que nous passons souvent en « bonne compagnie ». Passer le temps, comme on dit, ce n’est pas très grave en soi, mais… est-ce réellement ce que nous voulons ? Et disposons-nous vraiment d’autant de temps ?…
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Tu me demandes de mes nouvelles. Voici un aperçu de ce que Pierrette et moi faisons de neuf en cette période de confinement. Ce qui est nouveau pour Pierrette et moi, c’est notre marche quotidienne d’environ 15 minutes dans les rues de notre quartier, après le rendez-vous quotidien avec les représentants de la santé publique. Nous saluons les personnes que nous rencontrons tout en gardant deux mètres de distance entre eux et nous. Cette marche quotidienne m’amène à faire quelque chose de concret avec Pierrette. Je souhaite conserver la pratique de cette marche quotidienne, même si elles ne sont pas faciles pour moi au plan physique.
Pour inciter mes collègues à demeurer actifs et soucieux des membres plus âgés de l’AREQ RDN, j’ai contribué à éveiller Pierrette à la responsabilité que les membres du conseil sectoriel ont à l’endroit des membres de 70 ans et plus qui ne sont pas rejoints par nos messages électroniques. Grâce à son accès à la liste nationale des membres de notre secteur, Pierrette a identifié plus de 325 membres qui n’ont pas d’adresse internet, mais qui peuvent être rejoints par téléphone. Pierrette a constitué une équipe de 25 personnes bénévoles pour qu’elles téléphonent à ces 325 membres afin de vérifier comment elles se débrouillent en période de confinement. La très grande majorité se débrouille très bien. Quelques-uns avaient besoin d’une oreille attentive. Toutes les personnes bénévoles ont apprécié pouvoir rendre service en téléphonant à des membres qui n’ont pas d’adresse électronique.
Toutes les activités décisionnelles de l’AREQ, notamment l’assemblée générale sectorielle (AGS), l’assemblée générale régionale (AGR) et le congrès de juin 2020, ont été reportées à l’an 2021. Les présents mandats des diverses instances ont été prolongés d’un an. Pierrette demeure présidente de l’AREQ RDN, alors qu’elle avait accepté d’être mise en candidature au poste de la présidence régionale. Pour ma part, je demeure secrétaire du conseil sectoriel alors que j’avais accepté d’être mis en candidature au poste de la présidence du secteur RDN. J’avais envisagé me retirer comme répondant du comité des Hommes pour le conseil sectoriel et comme membre du comité national des Hommes. On me demande de conserver ces deux engagements. C’est ce que j’envisage de faire dans les circonstances. Au plaisir !
Wow! Que de belles et bonnes implications que Pierrette et toi accomplissez! Le monde est bien chanceux de bénéficier de votre générosité!…
Je souhaite que vos nouvelles habitudes de marches régulières dans votre quartier persistent au-delà de la pandémie…
Prenez bien soin de vous et au plaisir! 🙂
Merci pour ce cadeau rempli d’éveil et de poésie
Yvon
Merci Yvon! C’est gentil et j’apprécie… … 🙂
À bientôt j’espère…
Triste-Heureux… n’est-ce pas l’essence même de la vie ? Sauf quand on dort…et on dort toujours trop longtemps pour ma part. Le Prophète (Khalil Gibran) ne disait-il pas que : « Plus profondément le chagrin creusera votre être, plus vous pourrez contenir de joie ». C’est toujours un bonheur de te lire Benoit. Merci.
Salut Francine!
Merci pour tes bons mots, je les apprécie… …
Merci aussi pour cette réflexion du prophète que je trouve aussi bien vraie… En fouillant un peu les écrits de Khalil Gibran, j’ai trouvé cette autre réflexion qui illustre tellement bien ce que je peux vivre lors de périodes prolongées de méditation : « La solitude est une tempête de silence qui arrache toutes nos branches mortes ». Je crois que pour la plupart d’entre nous de très longues heures de solitude attentive sont nécessaires, avant que « toutes » les branches mortes se détachent, mais… chose certaine, il y a souvent tempête dans ces temps-là et certaines branches cèdent habituellement… 🙂
En cette journée de 50e anniversaire du Jour de la Terre (qui a aussi lieu chaque jour !), je te laisse sur une citation de David Suzuki : « Le changement n’est jamais facile, et cela crée souvent de la discorde, mais lorsque les gens se rassemblent pour le bien de l’humanité et de la Terre, nous pouvons accomplir de grandes choses. »
Au plaisir! 🙂