6. Re-venir au monde – Tendre vert nous rondement !


Re-Venir au monde

Le monde est tellement beau, maintenant, souvent ;

Lorsque je vois les vols d’outardes au-delà de ma bulle d’antan

Je pleurs, parfois, d’avoir retrouvé le contact avec le monde, si grand.

 

Quand les verts tendres du printemps autour de moi m’enchantent

Et que le parfum des fleurs en bordure de ma route m’envahit,

Il m’arrive de verser quelques larmes, malgré la ville et son vacarme.

 

Peut-être je me considère un peu moins important qu’avant, j’ai l’impression,

Mais je me sens tellement plus vivant, tellement plus content, souvent ;

J’ai cherché le mieux-être et j’ai ouvert mes fenêtres, une à une

Et je les rouvre encore, lorsque les grands vents du passé viennent les refermer.

 

On dirait que pour exister mieux, il faut exister moins,

Afin de donner vie à ce qui existe aussi, autour de nous, partout ;

On dirait que pour re-venir au monde, on doit mourir un peu, à « notre monde »

Et s’éteindre toujours un peu plus, pour vivre, toujours un peu mieux.

Pleurer de joie, par les temps qui courent,

C’est comme retrouver un peu de temps, perdu

Comme un trésor oublié par les passants, pressés.

 

Alors, on peut – donner –, un peu plus

Comme un Vaisseau qui, revenu au port,

Reprend la mer, chargé de l’Or du ravitaillement ;

Il a remis le cap sur le nord, simplement,

Mais en ces temps où les instruments se dérèglent, si aisément,

Il s’agit tout de même d’un événement, il me semble.

 

Le vent a repris son rôle ancestral et il porte, brillamment, le précieux métal,

De Vaisseau en Vaisseau, telle une rivière qui coule à flots d’Or au soleil régnant ;

Les eaux se mêlent comme au printemps lorsque la glace fond dans la montagne,

Les vassaux du soleil couchant se réveillent à l’immensité dont ils sont,

Dans les lueurs dorées et les parfums chargés qui se déploient sans cesse

De l’Océan de terre et d’étoiles où nous sommes, vraiment.

Tendre vert nous, rondement !

Prenons d’abord la peine de définir ce que nous entendons par « tendre vert nous ». Le « nous » représente cet ensemble dont nous faisons partie : le monde. Le monde, c’est beaucoup la nature dont nous sommes entourés : l’air, l’eau, les arbres, les animaux, etc. Et la nature a un urgent besoin d’être bien traitée, voilà pourquoi nous employons « vert » plutôt que « vers », lorsqu’il s’agit de tendre. Tendre vert nous, c’est donc aller vers ce monde – au-delà de notre monde familier – pour mieux le connaître, s’en occuper et y vivre.

Pause dans le vert tendre. Photo : Benoît Guérin, 2018.

Bien sûr, nous tendons déjà vers nous, j’en conviens. Et heureusement ! Qu’y a-t-il de plus beau que ces gestes de compassion pour accompagner et aider quelqu’un qui souffre ?!… Et les gestes d’amour, lorsqu’on s’oublie un peu pour faire plaisir aux autres… Parfois, nous prenons aussi le temps d’entrer en contact avec la nature, lors de longues marches en forêt, par exemple. De même, nous récupérons de plus en plus les matériaux résiduels de notre consommation : plastiques, papiers, vitres, etc. En fait, plusieurs d’entre nous connaissons, à nos heures, la joie de cette ouverture au monde, mais qu’en est-il des autres, de tous les autres ?… Que pouvons-nous faire pour que de plus en plus de gens puissent goûter, le plus souvent possible, au bien-être qu’apporte l’union au monde, au-delà de notre petit monde à chacun ?…

Avant d’envisager des moyens, il est important de prendre le temps de revenir un peu sur une autre constatation essentielle : malgré la pertinence et l’importance évidentes de tous nos gestes d’ouverture au monde, il semble que l’humanité demeure en perpétuels conflits armés dans un contexte technologique de plus en plus explosif et que nous sommes aussi constamment en retard sur la détérioration de l’environnement, alors que faire ?…

Voilà où intervient la dernière partie de l’idée, il ne s’agit pas seulement de continuer à tendre vert nous comme nous le faisons déjà, mais d’essayer d’adopter des moyens plus vigoureux et efficaces : tendre oui, mais « rondement », aussi. Tendre rondement « aussi » parce qu’il ne s’agit pas d’exercer les mêmes moyens plus efficacement, mais plutôt d’en trouver de nouveaux pour vivifier ceux qui existent déjà. Des moyens vraiment nouveaux, dans un autre registre « d’actions vert nous ». Quelque chose qui puisse stimuler ou même exacerber nos moyens actuels.

Depuis le début de ce manifeste, il est question de se réveiller pour mieux goûter la réalité, pour mieux être. Passer du rêve à la réalité, c’est malheureusement trop souvent perdre la qualité magique du rêve. Souvent les gestes d’aide envers les autres humains ou avec l’environnement sont difficiles à faire ou lourds à porter comme des fardeaux. Tendre vert nous, c’est souvent une lourde tâche. Et si on s’en faisait un beau projet qui remplisse notre quotidien de plus en plus et ce, à la grandeur de la planète et même plus. Un projet à hauteur de rêve, mais parfaitement réalisable. Un projet qui donne des ailes en quelque sorte ou qui aide à agir plus… rondement !

Le Temps soustrait la Vérité aux atteintes de l’Envie et de la Discorde. Nicolas Poussin, 1641.

Mais est-ce possible d’envisager un tel projet ? Moi, je crois que oui. Et vous ? Inutile d’aller plus loin, si nous n’y croyons pas, nous ne pouvons pas mettre en place de solution. La question n’est pas vraiment de savoir si cela est possible ou non, mais il s’agit plutôt de savoir si nous voulons – vraiment – essayer de faire quelque chose et… rondement.

Croire, c’est déjà quelque chose, mais croire en une solution qui irait rondement pour nous, pour l’humanité, c’est encore plus osé. Parce qu’il s’agit évidemment de relier le « nous » que chacun d’entre nous sommes, au « nous » que représente l’ensemble des humains desquels nous sommes aussi, et même d’aller au-delà. Eh oui, au-delà, nous ne pouvons tout de même pas laisser les autres êtres vivants auxquels nous sommes aussi reliés derrière nous ! Pas en ces temps de si grande précarité écologique qui nous appelle si crûment à nos liens de parentés trop souvent oubliés, non ?!…

Unissons-nous pour la paix. Murale, borough londonien de Hackney, Londres (Pxfuel).

Alors, voilà le tableau pour chacun de nous : moi, mes proches, les autres et tout ce qui existe, ensemble sur la même planète et dans le même espace. Rien de moins. De toute façon, de tous les autres « moins » nous sommes déjà témoins et il semble bien qu’il manque quelque chose, n’est-ce pas ?!…

Et ce n’est pas tout. Ce tableau est bien vivant et il se recompose donc à chaque instant. Un être naît, un autre meurt. Rien d’éternel, sur cette planète, à tout le moins. Le temps passe et nous passerons aussi. Alors, comment joindre le plus possible « aujourd’hui » le grand tableau duquel nous faisons partie ?… En y allant rondement évidemment, mais comment, concrètement ? Nous devons élaborer un moyen d’action vert nous de grande envergure, mais avec des résultats instantanés, au moins en partie. Ce n’est pas là un mince programme, j’en conviens, mais ce n’est peut-être pas un programme si colossal qu’il n’y paraît…

Peut-être que l’obstacle le plus grand pour mettre en œuvre un moyen semblable réside beaucoup plus dans nos réticences à l’envisager que dans les difficultés à le réaliser… De toute façon, des buts à trop long terme ou de trop petite envergure seraient incapables de porter nos rêves dans la réalité. Nous nous en retournerions vite fait à notre petit monde familier où, au moins, nous pouvons ressentir dans le confort du connu comme un parfum de rêve ; et ce, même si notre façon de rêvasser nous mène peut-être tout droit au précipice d’un point de vue écologique et social.

Alors, tant qu’à se fixer de nouveaux objectifs ou à prendre de nouveaux moyens pour tendre vert nous, il est impératif de placer la barre de nos exigences suffisamment haute pour qu’elle attise notre mieux-être ou qu’elle attire la magie toute naturelle de la vie dans ses plus beaux atours.

Le jardin des délices (détail). Jheronimus Bosh, 1504.

Finalement, de la même façon, certains pourraient penser qu’il est inutile de prendre autant d’explications ou de mises en contexte avant de parler concrètement d’un moyen qui peut nous permettre de tendre rondement vert nous, mais toutes ces prémisses s’adressent justement à cet obstacle si central que représentent nos réticences à envisager ne serait-ce que la possibilité d’un tel moyen d’action…

À venir dans la prochaine publication :
         Le poème : Le Vélo D’Or
         Le texte illustré : Les moyens pour aider le monde       

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6 commentaires à propos de “6. Re-venir au monde – Tendre vert nous rondement !”

    • Merci pour les bons mots mon ami; ils sont appréciés…
      Et j’attends les propositions de rencontre… Je peux tendre vert toi dans ton beau parc de proximité ou encore dans le petit parc devant ton café de prédilection rue Mont-Royal (mon ex!)… c’est comme tu veux… Tu pourrais aussi tendre vert moi et venir prendre un petit café sur ma galerie ou dans mon coin…
      Je crois qu’il vaut toutefois mieux viser ailleurs que le milieu de cette semaine (mardi à jeudi) où ils annoncent une température caniculaire que la petite bête que je suis ne supporte pas très bien! 🙂
      À très bientôt j’espère et prends bien soin de toi d’ici là!… 🌈

  1. Allo Benoit, quelle belle vision, et moi j’adore surtout comment la nature nous donne un espoir. C’est sa façon de nous remercier pour notre sacrifice social.
    C’est beau de voir que tu partages avec nous une si belle réflexion 🙂

    • Merci Elsa. C’est gentil et j’apprécie…
      J’espère que toute la famille va bien, malgré le sacrifice social que tu mentionnes avec justesse…
      Au plaisir et à bientôt j’espère xooox

  2. Bonjour Benoit. J’ai tardé à commenter ton dernier texte, car Pierrette et moi avions la garde des trois filles de mon garçon Xavier. Après une période de respect intégral des consignes de la santé publique, Pierrette et moi avons été interpelés par la détresse psychologique de la mère de ces trois petites-filles qi n’arrivaient plus à gérer ses trois filles à la maison tout en demeurant au travail à temps plein grâce à internet. Cette détresse est devenue plus évidente quand elle et nous avons appris que l’école que fréquentent ses deux plus vieilles allait ouvrir uniquement en septembre. Nous avons dépassé nos craintes légitimes pour offrir nos services et pour les prendre en charge trois jours par semaine à partir du 18 mai dernier.
    Nous les prenons en charge depuis trois jours par semaine du lundi soir au jeudi soir. La veille, Pierrette prépare les apprentissages qu’elle proposera le lendemain aux deux plus vieilles qui sont en première et en troisième année du primaire. Pour ma part, je fais faire des apprentissage à la plus jeunes qui aura bientôt quatre ans. J’ai même réussi à animer un atelier philosophique sur les émotions jeudi dernier pendant l’heure du cours de piano que Pierrette reçoit avec Skype. Il fallait y croire pour oser essayer de faire une différence dans la vie de la famille de mon garçon Xavier. Au plaisir !

    • Wow! C’est tout un engagement et une abnégation exemplaire que Pierrette et toi vivez là!…
      Autant c’est inspirant et autant cela met en lumière la galère terrible que doivent vivre des milliers de personnes durant cette pandémie historique dans laquelle nous nous trouvons…
      Heureusement, quelques inspirations et révélations parsèment aussi les histoires vécues ici et là…
      Puissions-nous retirer la plus grande sagesse possible des épreuves actuelles, n’est-ce pas?…
      Bonne continuité et au plaisir, mon ami! Mes salutations à Pierrette…

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