8. Humanité : le rêve


L’humanité rêvée, c’est l’horizon du bonheur.

Au loin, dans le flou des levers et couchers de soleil, un monde solidaire et soucieux de prendre soin de la nature se profile…

Photo : Benoît Guérin, 2022.

De nombreux humains privilégiés et heureux s’activent actuellement à concrétiser cette humanité dans laquelle le bien-être se propage le plus entièrement et rapidement possible.

Globalement toutefois, à l’échelle de la planète, il y a encore beaucoup de misère et on continue de dévaster la nature, malheureusement.

Lorsqu’on observe les nombreuses zones de conflits armés qui perdurent, les écarts de richesse qui se creusent entre les humains ou les gaz à effet de serre qui continuent d’étouffer la nature, c’est plutôt cauchemardesque !

Un monde rêvé

Dans un monde rêvé, on prendrait soin — le plus possible — de tout ce qui vit : humains, animaux et toute la nature.

Aucune partie de la nature ne serait perçue comme en dehors de chez nous. Chez nous, c’est la planète. Aucun humain ne serait perçu comme un étranger. L’humanité, c’est notre famille.

Notre planète (PublicDomainPictures.net)

Dans un monde rêvé, il peut bien sûr y avoir de profondes tristesses et de grands drames : les tremblements de terre et autres séismes naturels nous accompagneront toujours, la maladie et la fin de vie sont de grands défis immuables. Dans un monde rêvé toutefois, il ne devrait pas y avoir de situations stagnantes où des guerres, des famines et d’autres infamies persistent en toute impunité.

Il n’est pas réaliste de penser éliminer continuellement tous les problèmes, mais c’est bien possible d’envisager de les diminuer largement. D’ailleurs, dans certains pays, si ce n’est pas la vie rêvée, ça n’est pas bien loin de cela : pas de guerre, peu de discrimination, du support social et la nature de moins en moins maltraitée sur leur territoire. Toutefois, comme toute la vie sur Terre est intimement reliée, une vie presque rêvée dans un pays relève plus de la barbarie que de l’accomplissement, si elle ne cherche pas — en priorité — à prendre soin du reste du monde moins favorisé.

Une vie quasi-rêvée. Photo : Benoît Guérin, Paris, 2008.

Quelques enclaves privilégiées entourées de larges territoires dévastés et d’innombrables humains en détresse, c’est plutôt une triste réalité. Il est toutefois possible d’être heureux, ou plutôt triste-heureux, dans une telle situation. On peut jouir de la beauté et de la bonté du monde tout en essayant de diminuer les malheurs des moins favorisés et il s’agit là d’un privilège délectable, parole de moineau !

Aux origines du rêve

Après m’être faufilé de l’enfance jusqu’à l’adolescence en valsant de conflits en réjouissances, j’ai déboulé sauvagement dans les visions rêvées tout comme Alice avait plongé aveuglément dans le terrier du lapin. Immergé dans la fumée de cannabis et autres psychotropes, j’ai interrompu mon périple d’automate pour m’immerger dans des sentiers artificiels de volupté.

Les échos de la génération précédente résonnaient fortement dans les nouvelles avenues que je fréquentais alors. Leurs musiques planantes accompagnaient des actions radicales d’amour et de retour à la terre. Des appels à cesser les guerres, à se rapprocher de la nature ou à effacer les frontières. Comme plusieurs, j’appelais cela le Peace and love et il s’agissait d’un grand mouvement de contre-culture de la fin des années 60, dans les pays favorisés.

À la fin des années 70 où je me trouvais, il restait bien peu de ces manifestations contre-culturelles. J’ai vite compris, sans trop vouloir l’admettre, que la vaste majorité des rêveurs et rêveuses des années 60 avaient conclu à l’échec de leur mouvement et s’était réfugié au cœur de la culture dominante.

J’ai pourtant l’impression que cette grande quête collective visant la paix, l’amour et le rapprochement avec la nature POUR TOUS est fondamentale et essentielle. C’est l’horizon du bonheur qui se dessine dans de telles visées. Et quand cela s’inscrit dans un grand mouvement cela peut être particulièrement réjouissant.

Murale Lennon-Imagine. Adam Zivner, Prague, 2008. (GNU License)

La contre-culture des années 60 c’était un peu comme le bébé qui recèle toutes les promesses. Le rêve de la meilleure vie possible pour tous. En renonçant au rêve, c’est un peu comme si on jetait le bébé avec l’eau du bain. Il faut reconnaitre toutefois que l’eau du bain des années 60 avait certes besoin d’être un peu… clarifiée. La prise effrénée de psychotropes ou la sexualité sans limites sont peut-être des voies à expérimenter, mais ce ne sont probablement pas des avenues essentielles. Ce qu’il y a de fondamental dans un tel mouvement c’est la solidarité généralisée à l’échelle mondiale et le fait de prendre soin de la nature.

Bien sûr, l’ambiance de fête souvent associée à cette époque peut favoriser la participation et l’enthousiasme, mais une telle vague de changements ne pas être qu’un long party largement euphorique. Le partage des ressources et la diminution de l’exploitation effrénée de la nature peuvent aussi engendrer des changements plus difficiles à vivre pour les privilégiés, dont je suis.

Une voie vers le rêve

Pour qu’une situation rêvée puisse s’installer à l’échelle du monde entier, il faut mettre en place une organisation politique aussi effective que celle exercée dans les pays où une situation quasi rêvée est vécue actuellement. Avec l’actuelle Organisation des Nations Unies (ONU), ce sont surtout quelques représentants de nations dominantes qui gèrent les relations mondiales en laissant stagner les conflits et les misères qui ne les dérangent pas trop où même qui les arrangent.

Je sais bien que pour de nombreuses personnes une telle organisation mondiale est utopique, voire irréaliste. Je sais. Mais n’est-ce pas encore moins réaliste de croire qu’en conservant la recette actuelle nous puissions obtenir des résultats très différents ?

Utopie d’hier. Photo : NASA, 1969.

Toute la nature sur Terre est interreliée et l’humanité en fait partie. Fondamentalement, nous ne faisons pas exception. Nous avons élaboré de bien fortes frontières artificielles au fil des derniers siècles, mais je doute qu’elles soient bien plus porteuses de salut que les paradis artificiels dans lesquels je plongeais autrefois.

La structure politique que l’on doit élaborer et activer mondialement doit représenter les intérêts des humains et ceux de la nature en général. Elle ne doit pas chercher à préserver ou élargir seulement les privilèges de certaines nations dominantes. Le maintien de la paix sur la planète, par exemple, est actuellement limité par les cinq nations possédant un droit de veto au Conseil de sécurité de l’ONU.

Probablement que la domination actuelle de quelques puissantes nations à travers l’ONU est largement engendrée par le financement qu’elles procurent à l’organisation. Il est donc fort à parier qu’une éventuelle organisation priorisant le bien-être de tous sur Terre devra être largement financée par les organismes visant la préservation de la nature (WWF, Greenpeace, etc.) ou le bien-être des personnes (Amnistie internationale, Oxfam, etc.).

Les pays et les personnes doivent évidemment participer à une telle organisation, mais c’est le bien-être de tous et non celui de nations dominantes qui doit motiver les alignements principaux des actions pour la paix et la préservation de la nature.

Avant même d’envisager la composition d’un financement d’une ONU revampée ou d’un nouvel organisme politique mondial, un mouvement social largement représentatif de tous les horizons de l’humanité doit d’abord avoir lieu. Il pourrait s’agir d’un nouveau mouvement rassemblant les humains de toutes parts, autour des valeurs de base de paix et de préservation de la nature, un peu comme c’est suggéré dans le Mouvement Amour, Paix et Environnement Sain pour tout le Monde (MAPES Monde).

Drapeau du MAPES Monde.

Lien vers la chronique illustrée Prologue au MAPES Monde

Une telle mouvance pourrait aussi prendre place principalement dans les avenues des grands médias de communication et d’échange comme le propose l’initiative de La fin des milliardaires.

Pyramide du capitalisme. Nedeljkovich, Brashich, & Kuharich, Industrial workers, 1911.

Lien vers les chroniques illustrées de La fin des milliardaires

Un grand mouvement d’unification des humains autour de valeurs de base communes pourrait aussi prendre forme dans un regroupement des organismes travaillant à accroitre la solidarité ou la paix dans le monde et la préservation de la nature sur la Terre : Amnistie internationale, Oxfam, Greenpeace, etc.

Un rêve international et interculturel

Pour qu’un tel rêve puisse prendre forme, il faut surtout qu’une large partie des populations — de toutes parts — y participent. Il faut évidemment aussi que la plupart des pays y adhèrent. Plus largement encore, les multiples cultures devraient y participer.

Non coupable. Mr Brainwash, 2022.

Pour qu’un tel mouvement ait lieu, une convergence des divers points de vue culturels doit toutefois avoir lieu concernant le caractère prioritaire des valeurs de solidarité (paix et amour) et de respect de la nature (environnement sain). Ce grand rassemblement multiculturel doit donc aussi se constituer autour d’une intersection de valeurs communes ou interculturelles.

Au-delà de cet interculturalisme fondamental, la diversité culturelle demeure essentielle. Les particularités culturelles — et les langues au premier plan — constituent très souvent le ciment d’une première unification de proximité. Il est plus simple de se rassembler avec des personnes qui partagent notre culture. Il s’agit fréquemment, au moins, d’une bonne partance.

La multitude des couleurs culturelles vibrant à travers le monde est aussi l’un des aspects qui attirent actuellement tant de gens à vouloir voyager pour découvrir de nouveaux endroits, de nouvelles façons de vivre et d’autres expressions créatives.

Bibliothèque Budléienne, Université de Oxford. Photo : Benoît Guérin, 2019.

Les nationalités, et les cultures au premier plan, constituent autant de joyaux à préserver et à promouvoir. Et toute cette diversité sera d’autant plus importante si nous pouvons l’explorer au-delà des actuelles insécurités liées aux inégalités, aux conflits stagnants et à la destruction de la nature.

Tous les bouleversements sociaux (guerres et autres) et environnementaux (dérèglement climatique, disparitions des espèces et autres) actuels sont causés par les humains. Toutes les séparations territoriales et nationales actuelles rendent très difficile l’établissement d’un monde viable, et le plus agréable possible, pour tous.

Travailler à élaborer un monde solidaire qui prend soin de la nature c’est donc non seulement une démarche réaliste, mais aussi une entreprise urgente. Et c’est à chacun de nous d’y travailler autant qu’on le peut…

Le rêve au crépuscule

Au crépuscule de ma vie, je suis encore très partant pour participer à toute démarche visant l’unification de l’humanité, mais je n’ai plus l’énergie pour initier ou diriger des projets dans ce sens.

Je garde en vie, tant bien que mal, des initiatives comme le MAPES Monde et La fin des milliardaires de même que le manifeste poétique Le Vaisseau dort qui vise à questionner et relancer le MAPES Monde. J’entretiens donc un site WordPress où ces propositions sont présentées sous forme de chroniques illustrées. C’est aussi dans cet espace que je publie l’actuelle série de chroniques.

Couverture du manifeste poétique Le Vaisseau dort. Marqueterie du coeur de la Basilique Santa Maria Maggiore à Bergame, Italie. Lorenzo Lotto (1480-1556).

Lien vers les chroniques illustrées du manifeste poétique Le Vaisseau dort

Quant à l’espoir de voir ce rêve se réaliser, ou même s’amorcer significativement, de mon vivant, il a beaucoup diminué au fil des ans. Je garde espoir de voir se réaliser une telle organisation essentielle, mais je constate que les initiatives dans ce sens sont actuellement bien minces et marginales.

Je sais toutefois que l’humanité peut effectuer d’immenses réaménagements très rapidement. Nous l’avons constaté avec la récente vague de COVID 19 pendant laquelle les mesures sanitaires ont occasionné des changements d’habitudes hors du commun : explosion du télétravail, grande diminution des transports aériens, etc. Le défi n’est pas de pouvoir, mais bien de vouloir faire les changements qui s’imposent. Et comme les causes des problèmes sociaux et environnementaux actuels sont beaucoup moins évidentes que la présence d’un virus dans notre système, les actions résultantes s’avèrent aussi beaucoup moins conséquentes et efficaces.

Je continue d’appuyer autant que possible toutes les organisations visant à aider les humains moins favorisés ou l’environnement maltraité, mais je persiste à croire qu’il s’agit là de problématiques globales qui nécessitent des solutions de même envergure.

La danse. Henri Matisse, 1910.
À venir dans la prochaine publication :
Environnement et solidarité : de l’appréciable et du souhaitable
  • Les petits gestes
  • Les nobles engagements
  • La problématique des inégalités
  • Les implications extraordinaires

Lien vers la partie suivante: Environnement et solidarité : de l’appréciable et du souhaitable  →

Lien vers la partie précédente : Le bonheur, mais encore →

Lien vers le prologue

Lien vers les chroniques de La fin des milliardaires (Accueil)  →

Lien vers le manifeste poétique Le vaisseau dort 


4 commentaires à propos de “8. Humanité : le rêve”

  1. Texte très prenant et préoccupant!!! Tes photos sont magnifiques !!!🌈🌈🌈 chaque fois que je lis un de tes textes , une interrogation se manifeste!!!! 😍😍💥🌈🌈🌈

    • Merci pour ton commentaire Pierre. C’est bien apprécié! 🙂
      Au plaisir de prochains échanges sur nos interrogations et nos préoccupations!… 🤓🐝🌿🌷💓

  2. Mon cher Benoit,
    J’ai pensé commencer par « Mon pauvre Benoit », tellement je suis désolé pour toi que tes rêves ne soient… que des fantasmes.
    Il y a quelques jours je suis allé faire une petite visite de routine à l’hôpital. C’était une magnifique journée ensoleillée, idéale pour marcher et prendre l’air. Et pourtant, à la sortie de l’hôpital il y avait des voiture stationnées avec leur conducteur assis confortablement à l’intérieur à faire tourner inutilement leur moteur. Et tu sais que si tu veux voir des glaciers, c’est maintenant ou jamais car dans quelques années, FINI! BASTA! Et puis tu sais ce qui préoccupe les albertains en cette journée d’élections provinciales après ces terrifiants feux de forêts ? L’environnement? Mais non mon pauvre Benoit, l’énergie, l’important c’est l’énergie.
    Tout cela pour dire que ce n’est pas de notre vivant que ton fantasme se réalisera. Ceci dit, je continu chaque jour à apporter ma petite contribution, même si je crois que tout cela risque fort de se terminer noyé sous une mer de déchets.
    Pour terminer sur une note positive, joli rappel des années ’60 et comme toujours, magnifiques photos.

    Ton toujours ami Yvon

    • Salut Yvon!
      Merci pour ton commentaire.
      Le monde est en effet souvent à pleurer, comme le dit Jean Leloup dans sa chanson, mais… il fait tout de même très bon continuer de rêver un peu! 😎 Ne serait-ce que pour des jours lointains… … 🌷🌲🧑‍🌾
      Au plaisir mon ami! 🙂

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